
Avant de passer au tribunal, les antipubs s'affichent - Libé 1 Mars
Date: 09 mars 2004 à 00:43:12 CET Sujet: Coupures de presse
Avant de passer au tribunal, les antipubs s'affichent
Plusieurs opérations ce week-end, à dix jours du procès intenté par la RATP.
Par Guillaume ROLLIN
lundi 01 mars 2004
«Le procès à venir sera l'occasion de rappeler que plus de 5O% des panneaux publicitaires à Paris sont illégaux. » Christophe Mikhaïloff, conseiller (PRG) du 11e arrondissement
Les militants antipub sortent du métro et gagnent en visibilité. Ce week-end, plusieurs actions antipublicité ont été organisées, notamment à Paris et Marseille. Un énième coup de gueule contre «la marchandisation du monde et des esprits», qui a pris des allures de campagne de soutien aux 62 activistes assignés à comparaître devant le tribunal de Paris, le 10 mars, pour dégradations, par Métrobus, la régie publicitaire de la RATP.
L'«appel national» au barbouillage des espaces publicitaires avait été lancé quelques jours plus tôt par des militants marseillais sur le site www.stopub.tk. Samedi, ils étaient 150 à participer à une «déambulation festive» dans les rues de la ville, distribuant au passage un «manifeste contre le système publicitaire». Et dénonçant «l'omniprésence de la pub» : «200 milliards de francs en 2000, un million d'affiches, 40 kilos de prospectus par an et par boîte aux lettres.»
Peinture rouge. L'appel a été relayé, et même devancé, par les publiphobes parisiens qui se cantonnaient jusqu'icLi aux couloirs du métro. Dans la nuit de vendredi à samedi, porte de Clichy, ils ont déversé de la peinture rouge et blanche sur cinq immenses bâches publicitaires qui recouvrent des immeubles situés le long du périphérique. Samedi après-midi, dans le Xe arrondissement, une soixantaine de militants ont distribué des tracts «ni pub, ni soumis» avant de recouvrir trois panneaux publicitaires d'affiches blanches, pour en faire des «panneaux d'expression libre». Enfin, le métro parisien a été à nouveau la cible des antipub, samedi soir. La cinquième opération du genre en cinq mois. Par petits groupes de cinq ou six personnes, ils ont barbouillé les affiches publicitaires dans huit stations, selon la RATP. La «police du métro» a procédé à 18 interpellations.
Pour contrer le «puissant arsenal juridique et financier» de Métrobus, qui réclame aux 62 assignés 980 000 euros de dommages et intérêts, les antipub ont une nouvelle arme : les médias. Parmi les groupes disséminés dans le métro, samedi soir, l'un d'eux avait pour mission de «faciliter le travail des journalistes», explique Ahmed Meguini, 26 ans, qui fait partie des 62 assignés. «On commence à avoir de l'expérience, on ne commet plus les mêmes erreurs, ajoute-t-il. Je garde un regard critique sur les médias, mais je constate que sans la présence des caméras je me serais fait lyncher plus d'une fois. La seule fois où je n'ai pas maîtrisé la communication, je me suis retrouvé en prison !»
Résultat: les antipub ont pu compter sur la présence de la télé publique hollandaise, de la ZDF allemande et de la presse anglaise. Et sur celle d'élus parisiens, dont Jean-Christophe Mikhaïloff, conseiller (PRG) du XIe. «Le procès à venir est l'occasion de rappeler que plus de 50 % des panneaux publicitaires à Paris sont illégaux. La loi est pourtant claire : "Pas de pub sur les ponts ni à proximité des monuments historiques ou des espaces verts"», souligne l'élu, à l'origine il y a deux ans d'un vote en ce sens au Conseil de Paris qui n'a jamais été appliqué.
«Légitimes». Conseillère (Verts) de Paris et administratrice de la RATP, Charlotte Nenner juge, elle, «disproportionnée» la plainte déposée par Métrobus. Dans une lettre adressée à Anne-Marie Idrac, la présidente des Transports parisiens, l'élue demande que la RATP «retire sa plainte et engage une politique concertée de réduction de la publicité dans le métro». «Ce mouvement antipub largement soutenu par le public et les usagers pose des questions tout à fait légitimes, affirme-t-elle. La RATP a trop souvent considéré l'affichage publicitaire comme une animation alors que beaucoup d'usagers et de citoyens le considèrent comme une agression.»
Faux, réplique la RATP, qui n'a pas l'intention de perdre cette guéguerre médiatique. Dans le Figaro de samedi, le directeur commercial de la régie affirmait que «plus de 70 % des voyageurs estiment que la publicité rend leur trajet plus agréable». Sondage à l'appui.
«Si on peut réunir autant de monde à partir d'un simple appel sur Internet, c'est que notre cause est juste, réplique Ahmed Meguini. Devant les juges, nous allons assumer. On n'a pas l'intention de s'excuser. »
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